Tu
ne le sais peut-être pas mais Swyambu était cette
énorme usine de recyclage spirituel, pour le souffle
de l'esprit provenant de tous les royaumes possibles et imaginables
et tout ce que tu as fait dans ce stûpa sacré,
disait Mahâkâla, en réalité, tu peux
l'appliquer à l'univers entier. Quel bonheur de revoir
Chimyi, c'était était une adulte maintenant. Tu
sais, on était de vieux amis, c'est tout, ayant embarqué
pour un long voyage au cur du Troisième il
universel et même si cette expédition spirituelle
annonçait la présence de démons tapageurs
et d'animaux féroces, et de subtils et cruels espaces,
et de misérables gamins dépérissant et
de fantômes affamés, ces adorables et redoutables
démons ne cherchaient rien d'autre ici à Swyambu
que paix et tranquillité.
Et
c'était une offrande empoisonnée faite à
toutes les Dâkinîs tourbillonnantes et au Cambodge
enseveli sous la neige et aux victimes meurtries des holocaustes
évaporés et des camps silencieux et à toutes
ces sinistres armes nucléaires volantes et aux kabbalistes
en voie de disparition et aux chrétiens ivres et aux
Tibétains encroûtés partant en fumée
et pour tous les nouveaux goulags et les Hiroshimas contagieux
et les Auschwitz cancéreux et toutes ces foutues Bosnies,
sans oublier les gamins crasseux et envieux qui veulent te cirer
les pompes dans la rue.
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Alors
écoutes bien : voici des petits éclats provenant
du bon vieux Mohanjedaro et ces Chods égarés pour
les amoureux et les koras huileux du matin, et tu sais quoi,
c'est tout simplement le seul et unique oxygène spirituel
et c'est cette boisson fraîche libératrice venant
d'Allemagne de l'Est et cette chose fiévreuse et enivrante
appelée World Wide Web et enfin Bhûta se rapproche
et c'est cette putain de bureaucratie après avoir passé
tous ces stupides fax et coups de fil idiots, ça dure
une éternité et tu sais quoi, pas moyen d'envoyer
un e-mail à qui que ce soit et les Bouddhas en laiton
ringards étaient partout autour de nous, PARTOUT, dans
l'air toxique, pollué et brumeux qui attendaient même
qu'on leur serve leur petit-déjeuner à moitié
prêt à l'hôtel Pumpernickel.
Et
pour finir j'ai aussi vu tout ce sang à moitié
cuit dans les rues et les sombres feux malingres, et la fumée
noire sortant au son d'un sifflement, et ces gonzesses brûlantes
qui dans la chaleur de l'épouvantable Dakshinkali remuent
des chaudrons ; et ouais, tu vois seulement le grand vortex
impuissant et tu sais Vajrayogini et Shakyamuni ont tous deux
vécu ici, juste un fait, rien de plus.
Enfin
Namgyal, l'obstiné Namgyal, m'a appelé pour me
dire que le visa était prêt mais que le vol avait
été annulé et repoussé de vingt-quatre
heures, pendant que les cadavres continuaient à brûler
près des ghâts troubles et froids à Pashupatinath.
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